L'arnacoeur

   

Incroyable mais vrai, LA comédie classique de ce début d’année est… française. Si le cinéma hexagonal a très souvent brillé ces derniers temps en terme de cinéma d’auteur ou de films décalés, la production locale n’a jamais été en mesure de produire un film à la fois totalement grand public et profondément exigeant. Outre les accidents industriels récurrents (Astérix, CineMan, …), on ne compte plus ces dernières années les camions entiers de comédies mièvres et formatées qui se sont lamentablement échouées dans les salles, avec très souvent un bide à la clé et l’espoir de se refaire sur la télévision…ce qui n’arrange pas le niveau global de l’offre télévisuelle. Si ce film pouvait montrer la voie pour sortir de ce cercle infernal, ce serait une bien bonne chose…

Alex est briseur de couple professionnel. Avec l’aide de sa sœur et de son beau frère, il est payé pour sortir des filles malheureuses de leur relations avec des tocards finis. Un père lui propose alors une mission impossible : empêcher le mariage de sa fille dans une semaine. Problème ; le futur marié est un mec en or, brillant, agréable et dévoué…

Il est difficile de savoir par où commencer tant le film est une réussite à tous les niveaux. Ne nous y trompons pas, il s’agit pourtant bien d’une comédie romantique : des beaux sentiments, des quiproquos, une histoire simple et l’apologie de l’amour vrai. Mais cela n’empêche pas de bien faire le travail et proposer un mélange assez irrésistible de cocasserie et de bonne humeur. 

D’abord par une vraie ambition dans la déconnade : Alex et son équipe élaborent de monstrueux plans foireux pour parvenir à leurs fins et ne reculent devant absolument rien, de la simulation ultra musclée d’un car jacking au repeuplement transitoire d’un village berbère.  Et plus l’expert se loupe sur sa mission, plus les plans deviennent élaborés et drôles, Alex s’enfonçant au fur et à mesure que ces tentatives pour détourner sa cible de son mariage s’avèrent infructueuses. C’est souvent brillant, tout le temps drôle, et parfaitement bien rythmé. Loin des mise en scènes tranquilles et formatées, le réalisateur Pascal Chaumeil sort avec bonheur l’artillerie lourde : décors de rêve à Monaco, ralentis outranciers en cascades, montage fluide et punchy, le tout enrobé dans une vulgarité ambiante carrément réjouissante. Quel bonheur de voir un réalisateur qui ose nous mettre du Georges Michael plein les oreilles et qui n’a pas honte de se servir de Dirty Dancing comme référence culturelle principale. Et puis si le scénario n’est pas d’une originalité folle, les dialogues sont par contre taillés au poil…

Et surtout le film a pour lui d’avoir un des tous meilleurs comédiens français : Romain Duris. Dans les moments sérieux, dans les passages burlesques, il est toujours absolument parfait en obsédé à côté de ses pompes. Le couple qu’il forme à l’écran avec Vanessa Paradis fonctionne vraiment bien dans le registre du grand couillon et de la femme qui sait qu’elle veut, jusqu’à cette superbe escapade sur la côte qui se termine par la mère de toutes les chorégraphies nunuches... le must.  Mention spéciale aussi aux seconds rôles très réussis dont l’inénarrable François Damiens qui fait un numéro de plombier polonais exceptionnel.  Evidemment, tout cela se résoudra dans un très prévisible océan de bonheur, mais il serait dommage de bouder son plaisir tant ces gugusses nous rappellent que le charme et les bons sentiments peuvent aussi faire bon ménage.

Bref, un vrai coup de cœur pour cette comédie à l’histoire finalement assez convenue, mais dont on ressort léger comme l’air et avec une pêche d’enfer. Gros succès en vue…