Après quelques années d'absence, de grosses difficultés de montage, et l'ombre d'un opus raté (le très pénible Quantum of Solace), la production de James Bond a décidé de prendre le taureau par les cornes, en faisant de la sortie de cet épisode un événement planétaire. Un épisode dans la continuité de la mue opérée par 007 depuis Casino Royale, qui servira de manière durable de maitre étalon aux épisodes de la franchise. Si l'humour n'est plus totalement absent, James Bond est désormais sérieux, passionné, appliqué, tourmenté, à des miles de l'ancien espion frivole, joueur et gaffeur. Les gadgets sont présents en pointillés, peu compatibles avec une telle intensité dramatique.
La période ou Sean Connery pouvait tomber dans tous les pièges avec le sourire avant de s'échapper avec son stylo laser et emballer la secrétaire du grand méchant est bien révolue.
Pour accompagner cette transition, on a donc fait appel à un cinéaste dramatique, venant du théâtre et n'ayant pas grand chose à voir avec le cinéma d'action : Sam Mendes (Les noces rebelles, American Beauty).
Dont acte : si l'action est bien présente, elle n'est jamais au centre l'intrigue, Skyfall se contentant de remplir le cahier des charges minimal avec une première séquence turco-ferroviaire assez ébouriffante, et quelques règlements de comptes bien foutus au Royaume-Uni. Les véritables atouts sont ailleurs, et Skyfall n'en manque pas. Un splendide générique bien appuyé par le tube d'Adele. Des dialogues efficaces et un sens de la théâtralité qui sied parfaitement à cet univers. Un nouveau Q qui fait entrer les geeks en force chez 007. Des James Bond girls plutôt au dessus de la moyenne. Un méchant en très grande forme, que Javier Bardem incarne avec toute la démence que l'on pouvait attendre de lui, confirmant que l'acteur est décidemment très à l'aise avec les relooking capillaires les plus douteux.
Et puis, il y a cette photo absolument sublime de Roger Deakins, aussi à l'aise sous les néons de Shanghai que dans les Highlands écossais, qui donne au film un niveau artistique jamais atteint par la franchise. De grands acteurs devant la caméra, de grands artistes derrière, pas si compliqué de réussir un blockbuster adulte et soigné.
Un épisode très réussi donc, malgré quelques baisses de tension et une relative pauvreté en scènes d'action très spectaculaires passée la première bobine. Un épisode qui devrait installer durablement le James Bond 2.0 dans la liste des success-stories d'Hollywood.
Et pourtant, , un épisode qui semble pourtant toujours avoir un temps de retards sur ses avatars les plus récents que sont Jason Bourne (dans le registre tourmenté et paranoïaque) et Ethan Hunt (Mission Impossible, dans celui de l'action ludique et jouissive), dont les ombres planent de manière nette sur la première séquence du film. Et dont Skyfall n'atteint jamais l'efficacité absolue et l'inventivité visuelle, malgré ses beaux atours.
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