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24 juillet 2014 4 24 /07 /juillet /2014 09:33
Le journal des séries : True Detective

 

True Detective (HBO) - Saison 1 

 

C'était probablement la série la plus attendue de 2013-2014, comme "House of Cards" avait été celle de l'année précédente.

 

Disposant dorénavant d'un champion poids lourd sur le créneau des séries populaires (la très confidentielle "Game of Thrones"), la prestigieuse chaîne câblée HBO s'est dotée d'un nouveau poulain dans la catégorie des séries adultes, qui est quand même son cœur de métier au départ.

 

Si le buzz créé par la série n'a évidemment rien de comparable avec celui produit par les dragons de Westeros, "True Detective" a quand même fait son chemin, se payant même le luxe (classe ultime) d'unemerveilleuse parodie par l'équipe de Community

 

Si l'on ajoute à cela des audiences peu communes pour une série aussi complexe, (3.5 millions de spectateurs pour le final aux Etats-Unis), il y a de quoi alimenter les attentes de tous les sérievores un peu sevrés ces derniers temps en termes de séries mythiques.

 

Ils n'allaient pas être déçus, car cette saison est absolument incroyable, bluffante de maîtrise et de densité.

 

 

 

 

 

Ils sont deux, que tout semble opposer. Deux flics, (puisqu'on est dans un polar). Deux détectives avec sur les bras un crime rituel épouvantable au milieu des champs de la Louisiane.

 

Le calme intense, qui dessine tout dans un grand carnet, et le volubile fort en gueule. Le solitaire et le père de famille. Le rêveur et le terre à terre.

 

Soit une équipe des plus classiques, mais à un moment, tout se brouille. Le père de famille n'est pas si stable, le rêveur pas si perché que ça. Sur le chemin de cette enquête, tout semble se compliquer : le paranoïaque obsessionnel apparaît de plus en plus crédible tout comme les autorités de plus en plus suspectes. Et finalement, on est obligés de se poser la question : qui est cinglé, qui ne l'est pas ?

 

Il faut dire que dans la peau de Rust, le détective à fleur de peau, il y a Matthew McConaughey. Comme à chacune de ses sorties sur grand écran (ici, ou encore là), le texan bouffe tout. Avec son accent traînant et ses transformations, ses grandes tirades mystérieuses deviennent fascinantes, ses défis physiques parfaitement crédibles.

 

Une performance incroyable de plus, qui doit beaucoup au charisme de son partenaire à l'écran, l'excellent Woody Harrelson, parfait dans son rôle de père de famille au bord du gouffre.

 

Construite autour de ces deux immenses acteurs, la série ne manque pourtant pas d'autres atouts.

 

 

D'abord un lieu mythique : la Louisiane et ses bayous. Encore traumatisée par les cyclones, portant toujours l'histoire chargée de ce Sud pauvre et parfois un peu primitif. Un monde où l'on croise des prêcheurs sans scrupules, des familles un peu consanguines et de riches propriétaires terriens. Un univers hypnotique, parfois marqué par une petite touche de fantastique, même si l'on reste ici dans le pur polar.

 

Ensuite, une construction temporelle incroyable, parfaitement gérée sur trois époques différentes. Un découpage qui permet de donner une profondeur inédite à l'intrigue, qui se déroule donc sur plusieurs années. Sa lenteur prend de la distance avec beaucoup de bonheur des nombreuses "séries" (notez les guillemets) policières où le coupable est emballé pesé en 40 minutes pub comprise.

 

Enfin un mystère : pour bien accrocher chaque téléspectateur ! Même si l'on reste ici dans un domaine plus classique : des pièces de puzzle qui s'assemblent petit à petit, un détective complètement obsédé, des morts horribles et un serial killer qui court toujours.

 

Pour ne rien gâcher, il y a aussi des personnages à fleur de peau (camés, violents, dépressifs), quelques doux-dingues du Sud.

 

Mais aussi des séquences d'action remarquables. Une de nuit, dans un enfer urbain, à la Michael Mann, tendue en diable, filmée dans un étourdissant plan séquence de plusieurs minutes. Une en pleine lumière, au milieu de la végétation, presque simulée, presque à l'envers. Du grand art. 

 

 

 

Un empilement de pièces maîtresses qui s'assemble parfaitement. C'est dans sa cohérence que "True Detective" trouve en partie sa qualité. Là ou "House of Cards" (par exemple) échoue à rassembler toutes ses atouts en un ensemble crédible. Là où "True Blood" (en Louisiane aussi) a pris l'eau depuis longtemps de tous les côtés. Là où les grosses cylindrées comme "Walking Dead" étirent sans fin une trame narrative plus que mince.

 

"True Detective" est donc un ensemble incroyablement dense et riche, où l'on ne cherche jamais le gadget ou le tic de mise en scène gratuit. Ni à faire poireauter le fan pendant plusieurs épisodes avant de pousser sur l’accélérateur pour le season finale. 

 

Une seule réserve quand même : un dernier épisode pas tout à fait la hauteur du vertige du reste, et assez classique dans sa résolution. Dès que le temps se lisse, que l'action perd de son mystère, on revient à un polar agréable, mais pas aussi dingue qu'attendu.

 

Cette réserve passée, "True Detective" résume à merveille ce que sont devenus les grandes séries.

 

 

 

En 2014, il n'y pas plus de chef d’œuvres fleuve sur plusieurs saisons de 15 épisodes.

 

L'âge d'or est bel et bien fini et "Breaking Bad" était son chant du cygne. Le passage de témoin se fera donc aux prochains Emmy Awards, qui se paye un plateau royal du côté des séries dramatiques avec un beau duel entre les derniers monstres sacrés de l'âge d'or ("Breaking Bad" et "Mad Men") et les petites nouvelles de la génération Netflix ("House of Cards", et "True Detective" donc), arbitrés par "Game of Thrones".

 

Aujourd'hui, les séries peuvent se payer l'acteur de cinéma le plus coté du moment.

 

Aujourd'hui, les chef d'œuvres se jouent sur 8 épisodes, dans une saison courte et dense, qui frappe fort dès la première saison

 

Certains s'en plaindront. Les autres se réjouiront qu'HBO soit toujours capable de proposer des programmes aussi riches pour un grand public.

 

La saison 2 est en chantier, le créateur ayant annoncé qu'il repartirait sur des personnages différents. Dans un savoureux effet, cette nouvelle saison  donne lieu à toutes les supputations et à toutes les fascinations.

 

Vertigineux... jusqu'au bout.

 

 

 

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On ne peut pas déconseiller un tel objet, aussi beau qu'original. Mais on peut quand même prévenir que les meilleurs délires arty ne font pas forcément de grands films sur la longueur...

 

 

 

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