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15 février 2010 1 15 /02 /février /2010 22:03
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Un film avec Jim Carrey et Ewan McGregor, impossible à distribuer aux Etats-Unis ? Oui, quand ce film traite de l’homosexualité de façon réaliste, cynique, et surtout… directe. Pas de sous-entendus, pas de délicate histoire d’amour pudique à la Brodeback Mountain : on est dans le monde des grandes folles de Miami, du bling bling et des parties de jambes en l’air débridées dans les cellules ou dans les chambres conjugales. Merci à Luc Besson, qui a semblé (pour une fois) parier sur l’audace et sur l’originalité, et qui a permis que le film fasse son chemin jusqu’au salles.

Steven Russel décide, suite à un accident, de révéler son homosexualité et de la vivre pleinement. Pour satisfaire ses envies de luxe et entretenir ses conquêtes, il devient un pro de l’arnaque à l’assurance, à la carte bleue, aux chèques…Rattrapé, il se lie en prison avec un délicat petit mec dont il tombe follement amoureux : Philip Morris. Mais une fois sortis, Steven ne peut s’empêcher de reprendre le cycle arnaque – prison – évasion…

On doit reconnaître au film une qualité principale : son culot monstre. A la manière d’un bon film indépendant, le scénario démonte à peu près tout ce qui fait l’American way of life et tire à boulets rouges sur l’administration pénitentiaire, la religion, la famille modèle et, cerise sur le gâteau, l’état du Texas.  Jusqu’ici, ce n’est pas forcément totalement subversif, sauf que montrer deux acteurs très connus, dont une superstar du box-office, en train de se faire des gâteries dans une cellule où se rouler des galoches en gros plan, c’est osé et très rafraichissant. Gloire à Jim Carrey, donc, qui ne contente pas de compter ses millions et jouer dans des blockbusters à grimaces, mais qui continue à prendre de vrais risques avec son image pour monter des œuvres hors des sentiers battus. Un artiste plus qu’un bête prestataire de service. Il rappelle au passage qu’il peut être en plus un acteur fabuleux. En face, Ewan McGregor n’est pas mal non plus dans un rôle délicat, presque féminin.

Le générique affirme (deux fois) que l’histoire est vraie. On a du mal à y croire tant les arnaques et les péripéties paraissent énormes, l’arnaqueur de haut vol étant d’ailleurs un personnage de cinéma très classique, surtout quand les événements sont réels. De ce côté-là, le film remplie bien son contrat en déroulant une liste impressionnante d’escroqueries. C’est assez drôle et plutôt bien enlevé, même si l’histoire perd peu à peu en originalité après une première demi-heure démente dédiée au coming-out. Cela nous emmène vers une deuxième partie de plus en plus répétitive où le cycle arnaques-prison-évasion peut finir par lasser. Mais le twist final et l’ultime rappel à la réalité permettent de passer outre ces défauts et faire de Philip Morris un divertissement drôle et original, ce qui n'est déjà pas si mal... 

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8 février 2010 1 08 /02 /février /2010 22:22
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Quand on s’appelle Guy Ritchie, qu’on n’a plus fait un seul bon film depuis 10 ans et qu’on a eu une de ses œuvres (A la dérive) nominée comme « le pire film des dix dernières années », récupérer un gros film est une aubaine pour se refaire une santé. Mais comme cela ressemble vraiment à une dernière chance, Guy a appliqué très scolairement le guide du petit blockbuster du XXIème siècle pour les nuls.

Règle n°1 : ne surtout rien inventer, prendre une vieille idée et la dépoussiérer. Sherlock Holmes est un des personnages de fiction les plus connus au monde, mais son image de vieux crouton anglais (véhiculée par la télé et le cinéma) lui colle à la peau. Afin de mettre un peu de punch dans tout ça, le scénario le transforme en un curieux croisement entre le Mel Gibson de l’Arme Fatale (pour le close-combat, la tête brulée et le bordel qu’il fout autour de lui) et Docteur House (pour la drogue, le fouteur de merde, et l’égoïsme infantile), lui-même inspiré de Holmes, la boucle est bouclée. Holmes est donc superfort, superintelligent, mais aussi gentiment nonchalant, un peu puéril et parfaitement cool.

Règle n°2 : faire travailler de bons acteurs. Ca tombe bien, l’acteur le plus cool du moment (Robert Downey Jr) est libre entre deux suites d’Iron Man, et Jude Law aurait besoin d’argent pour payer les douzaines de pensions alimentaires qu’il se traîne. Robert et Jude nous déroulement donc avec bonheur leur petit numéro, pas désagréable au demeurant, mais sans trop se forcer quand même. On les a déjà vus faire ça dix fois, mais c’est toujours mieux que de se coltiner Michael Youn ou Franck Dubosc. Plutôt une bonne idée donc, mais de là à valoir un golden globe à Robert Downey Jr, c’est quand même un peu exagéré.

Règle n°3 : trouver une histoire complexe. A l’époque de Lost, des flash-backs et des circonvolutions narratives, cela devient compliqué d’appâter le chaland avec un scénario vide. Le script se veut donc complexe, nébuleux, en introduisant en particulier un intéressant combat entre les supposés pouvoirs magiques du méchant et les déductions rationnelles du héros. Mais les scénaristes ont confondu complexe et compliqué : on ne comprend parfois pas tout et le réalisateur n’aide pas beaucoup. Guy Ritchie manquant cruellement de finesse, c’est parfois déséquilibré et souvent maladroit dans la conduite de l’intrigue. La dernière heure plus fluide rattrape néanmoins certains de ces défauts

Règle n°4 : introduire une à deux potiches pour la décoration. Rachel McAddams (mmmmh) et Keily Reilly sont vraiment charmantes. De là à leur donner les vrais rôles centraux qu’elles mériteraient, faut quand même pas déconner…

Règle n°5 : réaliser le tout de manière énergique, mais pas choquante. La mise en scène est plutôt fluide, mais sans un seul plan audacieux. Pas de risque, on reste au tarif syndical.

Règle n°6 : préparer le terrain pour la suite, si jamais ça marche. C’est tellement gros que ça en devient comique, mais on nous présente un gros vilain génie du mal, qui devient central dans l’intrigue dans les 3 dernières minutes et qui présente l’inestimable avantage de ne jamais montrer son visage. Ben oui, on ne sait pas encore si Brad Pitt va accepter le rôle, donc autant ne prendre aucun risque.

A l’arrivée, un gros blockbuster pas spécialement fin mais pas déshonorant non plus. De quoi passer un moment agréable, surtout dans la deuxième heure, si on n’est suffisamment indulgent pour oublier les très grosses ficelles de l’ensemble. 

 

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7 février 2010 7 07 /02 /février /2010 19:08
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L’incroyable santé du cinéma israélien a été récemment récompensée. Après être revenue bredouille de Cannes où Valse avec Bachir avait fait sensation,  la production locale a été récompensée d’un Lion d’Or à Venise, qui peut être vue comme « le deuxième prix le plus prestigieux » du cinéma mondial. En plus d’être innovants dans la forme, ces artistes israéliens ont en commun le bon goût d’être pacifistes et de traiter les films de guerre sans chercher à en cacher la violence et la sauvagerie. La mauvaise conscience de l’état d’Israël en quelque sorte. 

Guerre du Liban. L’armée israélienne s’enfonce dans un pays en plein chaos, entre les alliés phalangistes, les ennemis palestiniens et syriens et les milliers de civils pris en tenaille. La vie à bord d’un char d’assaut est rude : le chaleur, le bruit, le stress rendent les heures d’attente insupportables.

La guerre vue depuis l’intérieur d’un char. Le réalisateur installe son principe de mise en scène et n’en changera pas de tout le film (à part le premier et le dernier plan) : toutes les images sont, soit à l’intérieur du véhicule, soit par l’intermédiaire du périscope de l’engin. L’effet attendu est immédiat : une impression permanente d’étouffement, une tension accentuée, et surtout une perception limitée et déformée de la réalité extérieure, que n’aide pas à compléter les rapports incomplets et partisans d’un chef d’unité pas commode. Mais contrairement à certains réalisateurs qui ont tendance à s’enfermer dans leur gadget de mis en scène (à la manière d’un Brian de Palma dans Redacted), Samuel Maoz utilise son idée avec brio pour raconter une page d’histoire et faire vivre l’événement au plus prêt, avec une double réussite.

D’abord, l’expérience en elle-même est très réussie : le huis-clos est parfaitement maitrisé et très bien réalisé malgré l’espace confiné : on sent presque les fumées nauséabondes et la chaleur écrasante envahir la salle. Les scènes de guerre sont brutales, rapides, hyper-impressionnantes. Le film remplit donc parfaitement son contrat d’être une « expérience »  au-delà d’un contenu, ce qui démontre un vrai talent de réalisateur, car garder son public accroché pendant une heure et demi dans une boite métallique est un véritable tour de force.

Ensuite, ce qui dit le film est également passionnant. Le point de vue limité, fragile, déformé des soldats à l’intérieur de l’engin illustre parfaitement une méconnaissance, voire un aveuglement d’une partie de l’armée. De plus, Le réalisateur n’a pas sacrifié le scénario à son parti pris radical de mise en scène : les personnages sont intéressants et fouillés, les dialogues soignés et les situations ne sont finalement qu’un constat, jamais manichéen mais toujours terrible. Un véritable uppercut, le premier grand choc de cette année.  

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3 février 2010 3 03 /02 /février /2010 19:53
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Un croisement entre Jason Reitman, le papa de Juno et Thank you for smoking, et George Clooney pouvait-il donner un mauvais film ? Ces deux là semblaient destinés à faire un film ensemble, en tant qu’illustres représentants d’un cinéma à la fois commercial et exigeant, mais aussi promoteur d’une forme de cynisme et d’ironie grinçante qui fait un bien fou.

Ryan Bingham a un job de bad guy : il passe sa vie entre les aéroports et les entreprises en plein sociaux qui lui sous traitent la peu agréable mission de licencier du personnel. Il n’a pas de chez lui, connaît par cœur les salles de transit et les halls de tous les hôtels du pays, est un solitaire, et adore ça. L’arrivée d’une petite nouvelle dans la boutique, pleine d’idées saugrenues comme le licenciement par webcam, va mettre en péril cet équilibre. Sans compter sur sa dernière aventure avec une commerciale qui devient trop sérieuse et le mariage de sa petite sœur qu’il n’a pas vu depuis des années...

Jason Reitman n’est pas un révolutionnaire. Ne vous attendez pas à une charge lourde contre le principe du licenciement ou contre le capitalisme en général, il a d’ailleurs déclaré que le fait que certaines personnes devaient parfois se faire virer était « logique ». Comme d’habitude chez lui, on s’accroche donc au basque d’un personnage haï ou méprisé mais au charme fou. Après le lobbyiste ignoble mais craquant, l’ado enceinte adorable mais chieuse, voici donc le bras armé du grand capital, qui va laver le linge sale des patrons avec classe, détachement et sourire. Loin des idéologies et des combats politiques, le film nous invite donc à un moment original, mélange surprenant entre le cynisme le plus éhonté (aah, Jason Bateman, patron en pleine extase devant les pertes d’emploi record aux US…), la dureté parfois violente de situations sociales desespérées et la tendresse la plus profonde, avec des histoires de cœur, de sexe et de famille. Le côté décalé du film ressort d’autant plus que les personnages évoluent dans un décor presque irréel, fait de chambres d’hôtels de halls d’aéroports, où une carte de fidélité Hertz ou Hilton vous ouvre toutes les portes, et voyagent vers des destinations pas spécialement glamour (Wichita, Des Moines et Omaha, pour ne citer que celles qui font le plus peur)

A l’arrivée, le mélange est assez irrésistible. Grâce d’abord à un scénario solide, qui réserve quelques surprises et qui parvient à boucler un slalom parfait sans jamais toucher un des nombreux clichés que l’on pourrait attendre de genre de film. Grace aussi à des dialogues acérés, vifs, plein d’humour et d’esprit, développés dans des scènes mémorables entre les licenciements tragi-comiques, les courses dans les aéroports et les séances de bitures un peu glauques dans des soirées corporate. Et puis enfin des acteurs au top du top : si George a rarement été aussi bon, il peut dire merci à l’ensemble des seconds rôles épatants rassemblés autour de lui, en particulier la géniale Vera Farmiga qui donne à elle seule l’envie d’aller camper dans les couloirs de l’aéroport de Kansas city.

Malgré une baisse de rythme et d’entrain sur dans la dernière partie, le film réussit donc une savoureuse combinaison de drame social, de comédie et de plaisir. C’est toujours bon à prendre. 

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29 janvier 2010 5 29 /01 /janvier /2010 08:20
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Un mystérieux vagabond parcourt l’Amérique post-apocalypse une bible en poche. Il ne reste plus grand-chose qui ressemble de près ou de loin à de la civilisation. Chaque rencontre sur la route peut être fatale et les quelques villes qui restent sont plutôt mal famées.

Le film post-apocalyptique dans toute sa splendeur et dans tous ces clichés. Rien de très nouveau sous le soleil brulant et permanent de l’Amérique dévastée : les hommes sont devenus des bêtes, les femmes des victimes innocentes et il ne reste qu’un cow-boy solitaire pour remettre tout le monde dans le droit chemin, de préférence à grands coups de tatane dans la gueule. La moindre denrée vaut son pesant de cacahuètes et n’importe quel auto-stoppeur cherche probablement à vous trancher la gorge. Si vous cherchez un film original, passez votre chemin, on est en présence d’un Mad Max new age, la rage et le dépouillement en moins, la foi et la vertu en plus, la thématique pseudo-christique et le twist final ultra téléphoné ne venant pas relever le tout. De même, le choix des acteurs et leur numéro ultra calibré peut faire sourire. Ils ont beau être plutôt à l'aise, ça doit être la 57ème fois que Denzel Washington nous fait le coup du héros hard boiled dur mais juste, pendant que Gary Oldman recycle pour la 72ème fois son numéro de psychotique mi-calme/inquiétant, mi-hystérique/violent. Mais bon, faut bien bouffer…

Cela dit,  sa grande prévisibilité est bien le seul reproche que l’on peut faire au film car pour tout le reste est impeccable. La réalisation énergique et rythmée des frères Hugues fait merveille dans les scènes d’actions, la photo surexposée est très chouette et met parfaitement en valeur de beaux décors intelligemment utilisés. Personne n’a lésiné sur le sang, la cervelle, les morceaux d’organes qui volent allègrement dans le champ, et l’ambiance globale du film est cohérente et finalement assez plaisante. Bref, sûrement pas un film qui fera date dans l’histoire du cinéma d’anticipation, mais un bon moment si l’on n’est pas trop regardant sur le fond et que l’on ne cherche pas trop à décoder une idéologie finalement assez simpliste. 

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28 janvier 2010 4 28 /01 /janvier /2010 07:48
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Les frères Coen font partie du décor du cinema américain. Venus des tréfonds du cinéma indépendant, ils ont su garder leur authenticité et leur univers qui les ont mené jusqu’à un triomphe oscarisé. Capables de réaliser des films de genres très différents, ils ont beaucoup de fans mais qui ont chacun leur opus favori. L’admiration que je leur porte est surtout due aux quatre films (Fargo, The Big lebowski, O’Brother et The man who wasn’t there) qu’ils ont produit entre la fin des années 90 et le début des années 2000. Quatre petites merveilles de polar, de comédie, de film muscial et de drame. Quatre œuvres majeures et irremplaçables. N’ayant plus rien à prouver, ils oscillent toujours entre les genres, mais avec une certaine nonchalance

Larry Gopnick, professeur à l’université dans une petite ville du Midwest, voit sa vie tomber en morceaux en quelques jours. Sa femme veut divorcer pour se mettre en ménage avec un amant inattendu, ses gamins sont en pleine crise d’ado débilisante, un étudiant cherche à le faire chanter et son frère débarque avec sa brouette de problèmes pleine d’addictions et de démêlés avec la police.

Les frères Coen ont changé. Leurs derniers films ont une nouvelle marque de fabrique : des histoires déstructurées, sans but et sans fin apparente. Le récit n’est plus du tout la base de leur cinéma, le point d’arrivée n’a aucune importance, seul le chemin compte. C’est du cinéma sophistiqué, souvent complexe à appréhender et parfois un peu déroutant. Le prologue donne le ton : dans ce qui semble être un pays de l’Est, un homme, une femme et un étrange visiteur dissertent de la mort des fantômes jusqu’à une chute morbide et inattendue. Puis, le film démarre en nous laissant en plan avec nos questions. C’est un peu ce qu’on pourrait se demander tout le long du film. Pourquoi ? On ne sent pas la finalité, le but, le point d’arrivée. Et lorsque celui-ci parvient, il est sec, brut, et nous laisse avec encore plus de questions qu’au début.  

Cela n’empêche naturellement pas le film d’être intéressant, cérébral, et souvent drôle, les frangins ayant gardé ce talent unique de pouvoir faire dérailler n’importe quelle scène dans l’absurde. On est très loin des films « sur rails », et régulièrement surpris par cette incongruité permanente. Et puis il y a un côté délicieux et voyeur à voir cet homme trop gentil, trop lisse, trop bien de prendre tuile sur tuile, le tout dans une peinture du petit monde juif du midwest tendre et cruelle à la fois.

On peut donc déguster ce film comme une petite friandise agréable et joyeusement barrée…ce qui n’empêche pas de regretter un temps pas si lointain où les frères Coen, en plus d’être décalés et mystérieux, étaient aussi des cinéastes majeurs et absolument brillants. 

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25 janvier 2010 1 25 /01 /janvier /2010 08:36
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Pour se lancer dans le biopic d’un des artistes français les plus marquants du XXème siècle, il faut sûrement être un peu inconscient. D’autant plus que le biopic est par définition le genre qui se prête le mieux aux tristes meringues académiques et chiantes (remember Coco avant Chanel). Joann Sfar, auteur de BD reconnu, a cherché à contourner le piège à tout prix en clamant haut et fort que ce film ne sera pas comme tous les autres. D’ailleurs, l’affiche et la bande annonce ne nous convient pas à « un film de Joann Sfar » mais bien « Un conte de Joann Sfar » L’histoire se déroulera donc par chapitres, en se concentrant au moins autant sur les rencontres importantes et inspirantes faites par l’artiste que sur le personnage lui-même. De l’enfance jusqu’à Gainsbarre, on suit les débuts, la gloire, puis la déchéance.

Le film n’est pas académique, on doit lui reconnaître ça. En ne cherchant pas à être exhaustif, et en introduisant une ambiance de conte fantastique, il intrigue et surprend. Quelques excellents idées parsèment ainsi le récit. Ne pas avoir eu peur du défilé de guests en est une : loin d’être artificielle, l’invocation des illustres personnages ayant croisé le grand Serge se fond parfaitement dans l’histoire tant ils SONT son histoire. Joann Sfar a également eu le nez fin en confiant les rôles à des artistes pas toujours attendus, mais vraiment brillants. De Katherine en Boris Vian à Anna Mouglalis qui fait une magnifique Juliette Greco, les rencontres sont furtives, mais belles et intenses. Mais c’est quand même Laetitia Casta qui marque le plus en Brigitte Bardot, dans une imitation incroyable du modèle, avec cette scène d’effeuillage sur une chanson jouée au piano. A ce moment, le film est à la fois musical, un peu historique, sensuel et pleinement poétique. On en, oublierait presque qu’Eric Elmosnino porte le film sur ses épaules avec un charisme et un talent qui force le respect. Si l’acteur connaissait un succès relativement confidentiel, il y a fort à parier que cela ne durera pas.

Le ton de conte irréel fonctionne également plutôt bien en nous éloignant du biopic planplan et ennuyeux. Le réalisateur n’oublie pas qu’il vient de la BD et se permet quelques incursions fantastiques graphiques et colorés, la plus réussie d’entre elles étant ce personnage de double immense et grotesque, qui suit Serge partout comme une mauvaise conscience. Si le talent d’illustrateur, et manifestement celui de directeur d’acteurs est patent chez Sfar, il n’est pas (encore) un parfait réalisateur. Il manque un petit brin de folie à l’ensemble pour être une réussite totale. On aurait souhaité voir plus de transgressions et de délires graphiques pour appuyer un scénario qui, s’il semble fidèle à la légende, est parfois un peu trop coincé dans la contemplation d’un personnage et dans la description d’une vie qui a été riche en talent d’artiste, mais finalement pas si extraordinaire d’un point de vue de l’humain. Des femmes, de la drogue, de la déchéance, c’est après tout le lot de toutes les stars du rock n’roll. Sur ce point là au moins, Serge Gainsbourg n’a rien inventé. 

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18 janvier 2010 1 18 /01 /janvier /2010 12:04
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A bientôt 80 ans, Clint Eastwood continue à tourner des films avec la régularité d’un métronome. Un par an au minimum, parfois plus, en changeant de thèmes, d’univers, d’acteurs. Parfois où on l’attend, quand il recycle ses vieux films et ses valeurs comme dans Million Dollar Baby ou encore Grand Torino. Et parfois où on ne l’attend pas du tout, comme dans cet espèce de biopic sud-africain ayant pour thème central…le rugby, soit un des sports les plus inconnus des américains.

1995, Afrique du Sud. La coupe du monde de rugby approche, mais l’équipe nationale, minée par des années de boycott des compétitions internationales du temps de l’Apartheid, n’est pas au niveau. Le président Mandela s’investit personnellement dans la préparation de l’événement, persuadé que les Springbox peuvent être une passerelle entre les blancs qui les adulent et les noirs, qui peinent à se passionner pour le rugby, ce sport de riches.   

On peut s’interroger sur ce qui aurait été dit si n’importe quel autre cinéaste qu’Eastwood s’était saisi du sujet. On aurait sans doute assisté à un procès en bonne et due forme de la naïveté américaine, qui se permet de réaliser un film joyeux et positif sur un pays où la réalité a été, et est toujours beaucoup plus contrastée. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : plus de deux heures de bons sentiments dégoulinants, de vision assez réductrice, de discours vibrants et de tough-speechs sur le terrain et dans les vestiaires. Un film américain dans le sens le plus banal du terme avec son cortège de louanges pour l’engagement et l’amour de son prochain. Quand le petit enfant noir est porté sur les épaules de gros racistes blancs à la fin de la finale et qu’on passe en boucle des images des bars pauvres de la ville où les supporters affluent, on est pas très loin ni de Michael Bay, ni de Rasta Rockett. De la part d’Eastwood qui est le meilleur représentant d’un cinéma noir, fin et ambigu, le grand écart est assez inattendu.  

Une fois acceptés le pré-requis des raccourcis et de l’émotion facile,  on peut quand même se laisser emporter par le film, qui est par ailleurs plutôt bien mené et assez plaisant, à défaut d’être fin et passionnant. Il faut dire que Mandela est un excellent personnage de cinéma. Président décalé, à la fois très humain et profondément calculateur, ex-prisonnier et résistant, il ne possède pas toutes les manières polissées et calculées des politiques « de métier ». Morgan Freeman lui prête son talent et son métier, et son charisme naturel fait le reste : il s’efface complètement derrière le personnage, dans un mimétisme très réussi qui bouffe l’écran à chaque fois qu’il apparaît. L’histoire est connue, elle n’en reste pas moins efficace, surtout quand elle met en avant les enjeux sportifs et la liesse populaire, avec un rythme impeccable et des images qui peuvent difficilement laisser indifférents. Cerise sur le gâteau, le film est régulièrement drôle et tendre, en particulier à travers la rivalité que se livrent les gardes du corps blancs et noirs. Quant au traitement du rugby, il pourra décevoir les aficionados de la discipline,  vu qu’il n’est traité qu’en tant que sport de contact et pour les valeurs qu’il véhicule, pas vraiment pour la beauté du jeu. D’ailleurs, les matchs sont filmés à la manière du football américain en se contentant de montrer des mecs qui se rentrent dedans avec allégresse, sans qu’on comprenne bien qui est où.

En résumé, un film plaisant et facile qui donne envie de se replonger dans l’histoire sud-africaine. Mais définitivement une œuvre mineure dans la filmographie de Clint Eastwood. 

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15 janvier 2010 5 15 /01 /janvier /2010 09:15
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Alexandrie, IVème siècle après JC. L’essor du christianisme dans un empire romain sur le déclin ne se fait pas sans heurts. Entre les pratiquants de culte anciens, les juifs et les chrétiens, la tension est à son comble. Hypatie, professeure et philosophe, choisit de ne pas prendre parti.

Curieux film que cet Agora. Un péplum intello sur l’histoire des religions et de l’astronomie, avec un budget massif, se déroulant en Egypte, tourné en anglais, par des espagnols. On ne peut pas parler de grande réussite ni de franc ratage, il s’agit peut-être d’un bon exemple de ce que l’’on peut appeler un grand film malade : des intentions admirables, une équipe brillante, un sujet passionnant et original, et un résultat qu’on trouve décevant alors que l’on aurait tant envie d’aimer l’expérience. Il faut dire que le traitement proposé est assez maladroit. C’est le problème avec les grands sujets ambitieux, ils sont plus exigeants à traiter et imposent une rigueur et un talent qui sont parfois intermittents ici.

En effet, Alejandro Amenabar n’est pas toujours l’homme de la situation, on sent bien que le réalisateur n’est pas spécialement à l’aise avec ces imposants décors, ces foules et ces grands espaces. Le cinéaste est plutôt habitué à traiter des petits sujets pour en faire des grands films (Les autres, Mar adentro) et semble parfois un peu perdu, hypnotisé par son film et son actrice. Le rythme en souffre, et la coupure temporelle franche en milieu de récit n’aide pas beaucoup à relancer une histoire qui fait très souvent du sur place. Et malgré l’intérêt du sujet, les scénaristes ont parfois cherché à pousser le bouchon un peu loin en mêlant à la fois une réflexion philosophico-religieuse et un exposé sur l’astronomie un tantinet léger sur la vérité historique. Une illustration de la maladresse parfois naïve du projet : les accents d’origine des acteurs qui percent régulièrement dans leurs tirades. Entre l’anglais très british de Rachel Weisz, l’accent français bien marqué de Michael Lonsdale et l’anglais latino un peu traînant du préfet romain, on se croirait parfois dans un péplum américain comme on en faisait il y a cinquante ans plus qu’à Alexandrie au IVème siècle. Pour un film européen, c’est quand même dommage de tomber dans ce travers.

Cela dit, le film n’a pas que des défauts : la lecture de l’intolérance religieuse naissante est plutôt fine, intelligente et non partisane : si aucun camp n’est spécialement pointé du doigt, le scénario n’hésite pas non plus à mettre les pieds dans le plat en montrant que les chrétiens de l’antiquité aussi ont pu être extrémistes et fanatiques. Et puis il y a Rachel Weisz, une des plus grandes actrices en activité, qui porte le film sur ses épaules du début à la fin. C’est en fait sur la fin qu’Amenabar réussit ses plus belles scènes, dans la violence du sac de la bibliothèque d’Alexandrie ou dans un dénouement tragique et poignant.

Au final, il y a beaucoup de choses dans ce film : des idées, des intentions formidables et une ambition qui fait plaisir à voir dans le cinéma européen. Mais aussi dur que cela puisse être à entendre, si il y a bien un domaine où les américains n'ont manifestement pas de soucis à se faire quant à leur avance, c'est bien celui du grand spectacle.


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6 janvier 2010 3 06 /01 /janvier /2010 08:22
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Francis Ford Coppola a été le plus grand réalisateur du monde. Il ne l’est plus. Après les années 70-80 où il a accumulé les films majeurs (Le Parrain 1, 2, 3, Apocalypse Now, Conversation secrète entre autres) et où il a été le pape du nouvel Hollywood, ce vieux Francis avait disparu de la circulation, rongé par sa mégalomanie, ses dettes et ses rêves de grandeur. Depuis quelques temps, il ressort des films mineurs, modestes à la fois dans la forme et dans le fond. Il déclare avoir retrouvé le plaisir de filmer en repartant de l’essence même du cinéma. Mais jusqu’ici, il n’y avait bien que lui qui avait retrouvé du plaisir…

Bennie arrive à Buenos Aires chez son grand frère Angelo qu’il n’a pas vu depuis des années. Celui-ci a changé son nom en Tetro, et refuse tout contact avec sa famille et son passé. Il laisse cependant Bennie rester quelques jours, avant que son bateau ne reparte. Partagé entre surprise et admiration, Bennie tente de reconstituer l’itinéraire de ce grand frère brisé.

Il faut se pincer pour y croire. Coppola, l’homme des immenses fresques et autres barnums cinématographiques, qui tourne un petit film fauché en noir et blanc. Deux frères, une femme, quelques personnages secondaires et la ville de Buenos Aires : une simple histoire de famille qui compte uniquement sur ses acteurs, ses dialogues et sa caméra, sans en mettre plein la vue. On se croirait dans un film indépendant tourné à la fin des années 60. Les thèmes traités, en revanche, sont complètement dans la veine du réalisateur et même sortis de sa propre vie : l’importance de la famille, les rancœurs, le patriarche, les liens du sang, la création artistique

Ce qui surprend au premier abord, c’est d’abord comme ce film se situe hors du temps. Grâce à ce magnifique noir et blanc et ce cadre intemporel de la capitale Argentine, l’histoire ne veut donner aucune indication, aucun lien qui la ramène à un contexte donné. Tout est centré sur l’histoire de ces deux frères et de leur famille. Les retrouvailles sont brutales, abruptes, inattendues. Fantastique première scène où Tetro refuse de sortir de sa chambre pour voir ce jeune frère qui arrive de l’autre bout des Amériques. Puis, petit à petit, on découvre des blessures, des rancœurs, une histoire douloureuse et pas encore oubliée. Le sujet n’est pas spécialement original mais il est abordée avec une grande sensibilité, une belle retenue et dans un univers latin à la fois adapté et enchanteur. Les quelques personnages secondaires donnent beaucoup de vie au récit, et les acteurs font des merveilles avec ces beaux dialogues mi-espagnols, mi-anglais. On savait Vincent Gallo intense, on le découvre aussi sensible, magnétique et décidemment très à l’aise dans ces rôles d’écorchés vifs. On ne sait pas trop où le film nous emmène mais on est conquis par l’ambiance et ces personnages à la fois intenses et singuliers.

Mais le film peine à boucler toutes les boucles qu’il ouvre. Lorsque l’on sort de la chronique familiale pour s’aventurer dans le monde artistique et dans les affres de la création, une bonne partie du charme s’évapore. Malgré quelques fulgurances, la dernière partie du film est donc assez boiteuse, et la grande explication finale s’enlise dans un final assez grandiloquent où Coppola semble rêver de nouveau à des grands films tournés dans des décors de rêve. Dommage, car le film était jusqu’ici vraiment captivant et remarquablement mené.

On gardera quand même en mémoire une des dernières répliques de Vincent Gallo « Succes means nothing to me ». De la part d’un authentique mégalomaniaque comme Coppola, cette confession sonne comme une belle déclaration à son public, comme un addict qui aurait tourné la page…

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